Kenshin le Vagabond est un des mangas le plus célèbres sur l'archipel nippon. Appartenant au style Shônen historique, cette série, nommée Rurôni Kenshin au Japon, est une fiction publiée pour la première fois en 1994 par la Shueisha Inc. Son auteur, Nobuhiro WATSUKI, a su apporter à son manga les éléments propres au manga à succès : un bon scénario, de l'humour fréquent, des personnages charismatiques et des dessins s'améliorant sans cesse, le tout agrémenté d'événements et personnages historiques.

La fine équipe de Kenshin Prenant place au Japon en 1878, alors que le Japon pénétrait dans l'ère industrielle (ère Meiji), après cinq ans de guerre civile (Bakumatsu), l'histoire relate les aventures d'un vagabond, expert dans le maniement du sabre et connu comme le plus féroce assassin du Bakumatsu: Kenshin Himura. Repenti en raison d'un secret impénétrable, celui qui fut jadis surnommé Battôsai l'Assassin se refuse de tuer et même de laisser les gens mourir, préférant se servir d'un sabre à lame inversée pour aider les gens. Après dix ans d'errance dans les campagnes nippones, ce paisible samouraï rencontre à Tôkyô une jeune kendôka, Kaoru Kamiya, avec qui il sympathise et décide à sa demande, de s'installer chez elle. Malheureusement, alors que Kenshin n'aspire qu'à une vie paisible et pacifique, les fantômes du passé reviennent bientôt l'assaillir, réclamant gloire, honneur,
justice ou encore vengeance pour tous ses crimes d'assassin commis pendant la guerre qui marqua la fin de l'ère Edo.
Avec un style graphique très souple et dynamique, WATSUKI nous fait pénétrer dans un univers certes historique mais très librement inspiré. De nombreuses références historiques sont citées et un soin tout particulier est apporté aux costumes et aux armes de l'époque. Celà dit, pour pouvoir donner un certain style à ses personnages, l'auteur pioche allégrement dans les références culturelles étrangères (ce qui n'est pas absurde en raison de l'ouverture du Japon au commerce extérieur dès 1858) et dans le domaine du jeu vidéo. Il n'est ainsi pas rare de voir des combattants porter des tenues militaires, arborer des revolvers ou encore cracher du feu !!!
L'histoire évolue de manière très classique sur la forme, c'est à dire qu'on passe de courtes histoires à une intrigue de fond avec la formation d'un groupe de héros face à plusieurs groupe d'ennemis. Le découpage des chapitres reste très commercial et on sent une certaine pression des éditeurs quant à la conception de certains passages de l'histoire. Cependant, sur le fond, l'auteur renouvelle le genre en distillant au sein de ses personnages une psychologie très poussée, apportant un réel charisme à tous les protagonistes de l'histoire, pour finalement abandonner tout manichéisme en rompant la frontière entre bons et mauvais. En effet, Kenshin n'est pas aussi pur qu'il n'y paraît tandis que ses adversaires défendent toujours une cause qui leur est chère et à qui on peut donner raison. Ce nouveau genre amorcé par Kenshin dans le monde du Shônen se répandit par la suite grâce à de jeunes auteurs de talent qui chacun à leur manière, s'inspirèrent de cette oeuvre culte pour créer leur propre vision du manga d'aventures. Makoto Shishio, une logique simple et sincère
Parmi eux, on retrouve deux anciens assistants de WATSUKI, Eiichiro ODA (One Piece) et Hiroyuki TAKEI (Shaman King) mais également Yoshihiro TOGASHI (HunterXHunter) ou encore Masashi KISHIMOTO (Naruto).

La série compte 28 volumes et s'est achevée au Japon en 1999. Elle fut par la suite éditée en France la même année. La traduction française et l'édition de Glénat sont très bonnes comme à l'accoutumée. Cependant les couvertures de l'édition française sont toujours moins jolies et attirantes que les originales. De plus, l'éditeur grenoblois a pris la mauvaise habitude au fil du temps, de recouvrir les planches de combat par d'énormes onomatopées qui gâchent la compréhension générale de l'action. Mais celà n'enlève en rien son mérite d'avoir adapté cette série inconnue en France qui demeure à ce jour son titre le plus vendeur après Dragon Ball.

Une âme forgée dans l'acier, un destin noyé dans le sang Kenshin le Vagabond a évidemment connu sa transposition en dessin animé. De qualité inégale, celui-ci s'achève lors de la période Shishio, au moment où il acquiert enfin une certaine qualité. La série TV, diffusée la première fois le 10 janvier 1996 pour le compte de 95 épisodes, est tout simplement décevante. Elle respecte assez peu l'œuvre originale et propose un graphisme presque grossier pour des scénarios pas toujours réussis. Un film d'animation fut également tiré de l'univers de Kenshin, avec un résultat totalement raté. Le scénario est beaucoup trop classique et le film est très décevant, sans aucun doute commercial. Enfin, Kenshin le Vagabond connut une transposition en quatre OAV, inspirées d'un passage du manga relatant le récit de ses souvenirs. Ces OAV, qui racontent l'origine du Battôsai devenu par la suite Vagabond, sont tout simplement exceptionnelles. Les dessins sont superbes et le ton devenu plus sérieux en font un chef d'oeuvre à part entière. Les musiques se fondent parfaitement dans l'action et apportent une touche émotionnelle fabuleuse. Deux nouvelles OAV sont également sorties au Japon qui narrent la fin de la saga. Sans
atteindre la perfection de son précédesseur, cet anime conserve l'ambiance et le graphisme du premier film au service d'une sublime fin, forte et captivante, qui clôt cette saga de manière magistrale

Comptant parmi le cercle très fermé des mangas d'anthologie, Kenshin le Vagabond est une oeuvre éblouissante de profondeur et d'action. Tout l'esprit du récit épique alliant courage, respect et remise en question s'y retrouve pour former un cocktail détonnant d'humour, d'action, de rêve et de philosophie mais aussi de cette petite touche tragique qui différencient les oeuvres exceptionnelles des chefs d'oeuvre.