La Restauration de Meiji
L'histoire d'une nation à son entrée dans l'ère moderne

Kenshin le Vagabond est un manga profondément ancré dans l'histoire du Japon, plus précisément au moment de l'entrée du Japon dans l'ère industrielle, entrée manifestée par le Bakumatsu, guerre civile entre partisans d'un Japon ouvert et Conservateurs nationalistes. Ce conflit et tout ce qui en a découlé est à l'origine de la saga.

Le Bakufu
En 1850, le Japon vit depuis trois siècles sous l'ordre des Shôguns, de puissants seigneurs répartis en fiefs sur tout le territoire. La situation politique nippone est semblable à celle de l'Europe médiévale et les conditions de vie y sont tout aussi identiques. Misère, servitude, conflits archaïques, chevalerie (Samouraïs) se côtoient dans un pays sans empereur en rupture totale avec la démocratie qui commence à fleurir en France et en Amérique. L'honneur y est une question de vie ou de mort et les duels au sabre sont ainsi très fréquents. Le peuple, essentiellement composé de samouraïs et de paysans, est entièrement soumis à son Shôgun respectif et les querelles internes sont légion.
Toutefois, le Japon n'a connu aucune guerre extra-territoriale durant ce régime autarcique.

Les navires noirs de Perry
C'est d'Amérique que va venir l'ouverture du pays au reste du monde. En 1853, délégué par les États-Unis, le commodore Perry, à la tête de ses «bateaux noirs», pénètre, menaçant, dans la baie de Tokyo. Le traité commercial de 1858, qui va découler de ce chantage à la guerre, autorise l'ouverture aux vaisseaux américains des ports de Hakodate et de Shimoda. Un tel bouleversement perturbe grandement l'économie japonaise, peu habituée à l'import/export de masse, et commence à ruiner le peuple. A ce moment, deux courants se forment: certains veulent expulser les "barbares" étrangers, d'autres souhaitent tirer parti de leur connaissances.
Les véritables divergences éclatent alors dans la lutte pour le pouvoir.

Le Bakumatsu
La grogne populaire se généralise au milieu des années 1850. De nombreux conflits mineurs éclatent aux quatre coins du pays. Les routes ne sont plus sûres à cause de la misère ambiante et le trafic d'esclaves se répand. De plus, la tuberculose fait des ravages parmi la population qui n'a aucun moyen de se soigner. C'est à cette période que les parents de Kenshin meurent et que ce dernier est recueilli par Hikô. Les troubles s'intensifient autour de la capitale Kyôto et le Shogûn Yoshinobu Tokugawa y loue les services de la faction ShinsenGumi chargée de maintenir l'ordre dans la capitale dans laquelle le groupe révolutionnaire des Patriotes mène des actions terroristes.
En 1864, Kenshin rejoint le clan des Patriotes en tant qu'assassin au moment où les troubles sont les plus violents.

L'affaire Ikedaya
L'un des tournants de la guerre. Le 8 Juillet 1864, les plus radicaux des Patriotes, commandés par leur chef Katsura se retrouvent dans l'auberge Ikedaya afin de mettre au point un plan ambitieux visant à transférer l'Empereur à Chôshû et à incendier Kyôto pour couvrir l'assassinat de plusieurs haut-fonctionnaires. Toutefois, informé peu avant la réunion, le ShinsenGumi, emmené par Kondô, Okita et Saitô, effectue une rafle dans l'auberge, annihilant le complot dans l'oeuf. Par chance, Katsura, reparti plus tôt ne fut pas inquiété au contraire des leaders Yoshida et Miyabe. Ce jour-là marque la domination totale du ShinsenGumi qui s'impose comme la seule vraie force de sécurité de la population de la capitale.
C'est le lendemain de cette bataille que surviendra la première rencontre entre Saitô et Kenshin, dans la rue principale.

L'incident des Portes Interdites
Conséquence directe de l'affaire Ikedaya, à l'annonce de la nouvelle dans le fief de Chôshû, une armée rebelle composée de 3000 hommes se forme et marche sur Kyôto ne se doutant pas que 20000 soldats du Bakufu les attendent de pied ferme. Le 18 Juillet, l'armée rebelle est décimée et les Patriotes perdent tout pouvoir populaire. Katsura décide de se cacher et confie alors Tomoe à Kenshin, lui demandant de vivre avec elle le temps d'organiser une révolte. A ce moment, Kenshin et Tomoe deviennent mari et femme et partent s'installer dans une petite ferme d'Ôsu.

Les deux ordres shogunaux d'écraser Chôshû
Octobre et Décembre 1864, le Shôgun Tokugawa lance deux fois coup sur coup l'ordre de détruire le clan Chôshû. Révolté, Shinsaku Takasugi prend les commandes du Kiheitaï, son armée révolutionnaire (dont Kenshin avait fait partie) pour contrer l'armée shôgunale. La guerre devient chaotique dans le fief de Chôshû.
Parrallelèment à celà, c'est à ce moment que surgit Enishi dans la vie de Kenshin. Celui-ci exhorte Tomoe à se venger mais doit essuyer son refus. Pour protéger son mari, cette dernière se sacrifie et périt de la main même de Kenshin.
Peu après, en Janvier 1865, Iizuka est exécuté par Shishio et Kenshin, abattu, fait le serment à Katsura qu'une fois la guerre terminée, il ne tuera plus jamais. En attendant, il devient combattant officiel des Patriotes.

La reddition d'Osaka et de Toba-Fushimi
En 1867, Takasugi meurt de la tuberculose au milieu de la bataille de Toba-Fushimi, première grande victoire des Patriotes. Au même moment, Kenshin aperçoit Enishi pour la dernière fois avant son départ pour la Chine et déjà ses cheveux ont pris la couleur de sa haine. De son côté, le Shôgun Tokugawa, acculé, abandonne le château d'Osaka et son armée moribonde pour rallier Edo (l'actuelle Tôkyo). Réfugié au temple Kaneiji, il décide, après une longue discussion avec le Patriote Saigô le 9 Novembre, de renoncer au château d'Edo que défendait entre autres la faction Oniwaban Shû d'Aoshi Shinomori. Par cet acte historique, Tokugawa abandonne le pouvoir à l'Empereur Kômei. Celui-ci mort en Janvier 1868, les Patriotes placent sur le trône le jeune Mutsuhito âgé seulement de quinze ans.
Le long règne de l'Empereur Meiji commençe alors et le Japon s'ouvre à une nouvelle ère à l'image de Kenshin qui reçoit son sabre à lame inversée du maître Shakkû Arai avant de partir errer sur les routes à la recherche de la redemption.

Les guerres de Boshin et de Seinan
A peine sur le trône, l'empereur Meiji se voit confonté à plusieures batailles, le Bakumatsu n'étant toujours pas terminé. Le ShinsenGumi, féroce adversaire des Patriotes se bat jusqu'à la mort à Kyôto lors de la guerre de Boshin. Durant cette bataille, la capitale est ravagée et incendiée pour la dernière fois. Elle prend fin en 1869 avec la défaite du ShinsenGumi et la proclamation de Tôkyô comme nouvelle capitale.
Les divisions survivantes du ShinsenGumi et les troupes fidèles à l'ancien gouvernement tentent alors un coup d'état à Seinan lors de la dernière grande guerre civile de la restauration Meiji. Katsura périt de la Tuberculose début 1870 alors que le père de Kaoru, le doyen Kamiya, perd la vie à la guerre de Seinan et que Shishio recueille Seta dans la province de Kyôto. Terrassées, les trois dernière divisions du ShinsenGumi (dont celle de Saitô) se rendent au nord à Hakodate où elles sont entièrement détruites.
Ainsi se termina le Bakumatsu. Le Japon lança alors sa folle course à l'armement et à l'industrialisation accélérée. L'ère Meiji se termina en 1912, elle marqua la période la plus importante de l'histoire du Japon, de nation médiévale, celui-ci passa au statut d'état fort et expansionniste, comptant parmi les puissants du monde.

Le Haibutsu Kishaku
En 1868, l'une des premières décisions du gouvernement Meiji fut de transformer le Japon en un état-nation puissant. Ceci s'effectua dans tous les domaines et priorité fut accordée à tous les aspects de la civilisation nippone. Cette décision s'appliqua ainsi au domaine religieux et ordre fut donné de séparer le shintoïsme du bouddhisme afin d'affaiblir l'influence de ce dernier. Portées par un fort mouvement populaire, les autorités religieuses exercèrent une sévère répression sur les temples et objets de culte bouddhistes, ce mouvement garda le nom de "Haibutsu Kishaku".
C'est à cette période que Anji perdit les enfants dont il avait la charge dans l'incendie de son temple et devint la machine assoiffée de vengeance qui se rallia à Shishio dix ans plus tard.

L'incident du Maria Luz
L'un des principaux scandales sociaux du début de l'ère Meiji. Une nuit de 1872, un coolie chinois s'échappa d'un bateau péruvien, le Maria Luz, qui venait d'ancrer dans le port de Yokohama et réclama asile au gouvernement japonais. Celui-ci comprit rapidement que le bateau servait au trafic d'esclaves, il affranchit le coolie et expulsa le Maria Luz, fier de démontrer au monde entier que les droits de l'homme étaient respectés au Japon. En guise de réponse, les autorités péruviennes rétorquèrent que les prostituées nippones étaient elles aussi privées de liberté et forcées de travailler jour et nuit. Acculé, le gouvernement Meiji décréta leur affranchissement sans indemnités, ne les considérant pas comme êtres humains mais comme bétail. Il sauva ainsi la face mais son attitude médiévale était loin de respecter les droits de l'homme. Yumi, à cette époque déchue de tout son honneur et de son prestige, le dira mieux que quiconque:
"C'est drôle, non...? Les esclaves sont des êtres humains mais pas les prostituées..."

Les Patriotes (Ishinshishi)
Première des quatre grandes armées authentiques du Bakumatsu présentes dans le manga, la faction des Ishinshishi (ou Patriotes) s'est battue pendant six ans pour la restauration de l'ère Meiji. Issu des fiefs de Chôshû et de Satsuma (qui s'allièrent par la suite), ce clan se forme à Kyôto sous l'égide de Kogorô Katsura, Takamori Saigô et Toshimichi Ôkubo, trois chefs de différents fiefs provinciaux. Perpétuant des actions terroristes dans la capitale puis prenant l'envergure d'une vraie milice clandestine organisée, l'armée patriote faillit malgré tout disparaître après l'affaire Ikedaya mais elle réapparut de plus belle un an plus tard grâce au Kiheitaï de Takasugi, pour contrer le Bakufu et le ShinsenGumi. Partisans d'un Japon ouvert et tolérant, les Patriotes avaient choisi la voie de la force pour faire entendre leur voix et y sont parvenus. Les chefs prirent une place importante dans le gouvernement Meiji mais la force qui les animait faiblît avec le temps, ne faisant pas du Japon la nation idéale qu'ils s'imaginaient.

Le ShinsenGumi
La plus populaire des factions armées du Bakumatsu, le ShinsenGumi continue encore aujourd'hui d'alimenter l'imagination des écrivains et mangakas japonais. Fondée sous l'égide d'Isami Kondô, samouraï de Mibu, cette troupe d'experts en sabre vêtus de bleu était composée de dix sections commandées par un capitaine extraordinairement doué. Engagé par le Shôgun Tokugawa dès le début des troubles, le ShinsenGumi s'impose rapidement comme le pire ennemi des Patriotes, les traquant sans relâche dans les rues de la capitale. Usant de tactiques souvent déloyales mais participant également aux combats de masse, cette armée avait la priorité de rétablir l'ordre et ne pouvait se soucier du code d'honneur dans les conflits urbains. Ses membres ont à leur façon contribué à l'avènement de l'ère Meiji, se battant pour le Japon qu'ils jugeaient idéal, conservateur mais pacifique. Parmi les anciens membres du ShinsenGumi qui apparaissent dans le manga, on notera surtout le soldat Jinne et les capitaines Okita et Saitô.

Le Sekihôtaï
Cette armée fondée en 1868 est très peu connue du grand public. Peu après la bataille de Toba-Fushimi, l'armée révolutionnaire est devancée sur la route d'Edo par cette division armée constituée de paysans et de commerçants qui annonce à la population la promesse du gouvernement Meiji de baisser de moitié les impôts. Le Sekihôtaï apporta une aide précieuse aux Patriotes mais à la fin des combats, cette division fut considérée comme une fausse armée rebelle par un gouvernement qui n'avait pas l'intention de tenir ses promesses. Tenu comme bouc émissaire principal, le capitaine de la faction, Sôzô Sagara fut capturé et éxécuté à l'âge de 29 ans. Le Sekihôtaï ne bénéficia jamais d'aucune reconnaissance nationale, encore même à ce jour. Sanosuke appartenait à cette section alors qu'il avait 10 ans, Sôzô Sagara était son maître.

Yaminobu et Oniwaban Shû
Autres ennemis des Patriotes, ces deux armées de l'ombre étaient chargées de protéger les châteaux d'Osaka et d'Edo, grâce à leurs excellentes capacités aux armes blanches. Ces deux groupes apparaissent dans l'histoire de Kenshin (les Yaminobu lors de la mort de Tomoe et Oniwaban Shû lors de l'affaire Takeda). Toutefois, contrairement à ceux de Watsuki, leurs membres n'étaient ni des ninjas, ni des espions.
Ce sont des factions très peu connues de l'histoire du Japon, qui n'ont jamais vraiment combattu au grand jour.

"Vous, les patriotes, vous croyez que vous êtes les seuls à avoir construit la nouvelle ère, en oubliant que nous, les hommes du Bakufu, avons aussi consacré notre vie pour cet avènement.
Seulement nous, nous en sortons comme les grands perdants"
Hajime Saitô