Les OAV de Kenshin le Vagabond
Quel jugement peut-on accorder à la version animée de l'histoire de Battosai ?

Saitô et Okita, les redoutables capitaines du ShinsenGumi Comme nombre de mangas à succès, Kenshin le Vagabond, fort de la renommée acquise grâce au magazine Jump, fut adapté en série TV pour la télévision japonaise en 1996. Bien que d'une qualité assez honorable, cette version animée de la saga du Vagabond ne parvint en France qu'en 2002 sous la forme de cassettes VHS. Parallèlement, chose exceptionnelle dans le monde de l'anime, une série de 4 OAV (Original Animated Video) apparut sous la forme d'un DVD dans les bacs français fin 2000, quasi simultanément avec sa version originale. Celui-ci intitulé "Tsuioku Hen" (Les Chapitres du Souvenir) reprenait le passé de Kenshin alors qu'il était encore assassin de l'ère Edo au service des Patriotes.
Cet anime, produit par la Shueisha, avec Kazuhiro FURUHASHI en maître d'oeuvre, s'imposa d'emblée comme l'un des meilleurs film d'animation de tous les temps. D'une nature beaucoup plus sombre et sérieuse que la même histoire dans sa version papier, le Chapitre du Souvenir ne s'inscrit pas dans la continuité du manga. Entendez par là qu'aucune allusion aux aventures de Kenshin dix ans plus tard n'y apparaît et que par là même, il n'est pas indispensable de connaître le manga pour apprécier les OAV. Loin de là.
L'histoire débute en 1857, lorsque Hikô, maître expert en sabre rencontre le jeune Shinta, le renomme Kenshin et le recueille pour lui enseigner son art. 7 ans plus tard après une violente dispute, Kenshin quitte son maître et se rend à Kyôto pour devenir assassin Patriote et oeuvrer à la construction d'une nouvelle ère. Sombrant de plus en plus dans la frénésie meurtrière, il y rencontre une jeune femme, Tomoe, prête à devenir le fourreau de sa folie mais dont les desseins sont bien plus sombres qu'il n'y paraît. Supervisée de A à Z par WATSUKI, cette production bénéficie d'une qualité d'animation jamais vue à ce Une blessure pire que la mort
niveau, d'un graphisme exceptionnel, simple et fort et d'une ambiance sonore inoubliable, orchestrée par le génial Taku IWASAKI pour qui il s'agissait du premier travail musical. Il n'est pas exagéré de dire, qu'au simple niveau technique et graphique, cet anime égale tous les chefs d'oeuvre du genre. Et pourtant, c'est bel et bien au niveau scénaristique qu'il puise toute sa richesse et sa profondeur émotionnelle. Il va de soi à première vue que, pour l'initié, l'histoire est bien connue vu qu'elle est identique à celle racontée par Kenshin dans les volumes 19 à 22. Pourtant, bien que certains personnages du manga se retrouvent dans l'OAV, sa narration est si intelligemment faite qu'il n'est nul besoin de les connaître pour comprendre l'intrigue.
Le plus beau passage de l'histoire Au contraire, par le biais d'une ambiance musicale exceptionellement émouvante et d'un jeu de mise en scène magistral, fait de contrastes entre dialogues et non-dits, entre scènes d'une violence rare et moments de paisible quiètude, cette OAV nous immerge entièrement dans l'univers de Kenshin et Tomoe, nous faisant ressentir des émotions à un degré palpable tant la réalisation atteint un niveau de perfection. La différence de ton entre le manga et l'OAV est d'ailleurs flagrante car l'auteur a choisi de concevoir cet anime comme un film à part entière accessible à n'importe quel spectateur et le résultat est au-dessus de
toute attente. Les moments anthologiques sont légion, de la rencontre entre les deux amants, couverts de sang à la bouleversante scène de la mort de Tomoe en passant par l'horrible assassinat de Kyosato, tout est pensé pour toucher le spectateur au plus profond de son être et lui inspirer tension, calme ou tristesse de la plus réussie des manières, le tout étant réhaussé par la magnifique bande son d'IWASAKI qui signe là un véritable travail de maître, digne des mélodies de Yôko KANNO. Pour trouver des défauts à cet anime, il faudait vraiment chercher la petite bête tant l'oeuvre atteint la quasi-perfection: signalons par exemple la présence de Enishi, pas spécialement nécessaire et le duel entre Kenshin et Saitô inachevé pour des raisons évidentes que seul le lecteur du manga peut comprendre, mais qui ne gênent cependant pas à la compréhension globale de l'oeuvre. A noter également que la fin de l'OAV, pour le néophyte, reste très ouverte et peut autant faire croire (à travers la tombe ornée du ruban de Tomoe) à la mort du Battosaï qu'à sa rédemption par l'errance.

Il est aujourd'hui inconcevable de parler de la saga de Kenshin le Vagabond sans mentionner les OAV "Tsuioku Hen" qui sont encore aujourd'hui considérées comme les meilleures de l'histoire de la japanimation. Aucune autre n'a su les égaler à tous les niveaux sinon peut-être les OAV "Seisou Hen" (les Chapitres de la Rédemption) sorties en 2002 et relatant la fin de l'histoire de Kenshin. Il s'agit là de l'une des oeuvres les plus abouties de l'animation japonaise qui peut compter parmi les trésors du genre à côté des films de MIYAZAKI et TAKAHATA.

"Les sentiments, il n'y a rien de plus troublant. Et plus la passion est grande, plus il est difficile de lui échapper... La différence entre la haine et l'amour n'est pas plus épaisse qu'une feuille de papier !!" Chef des Yaminobu